A Zurich, belle cité ancienne qui s’enroule autour d’un lac paisible, il faut aller à l’ouest pour trouver les quartiers les plus sauvages et les plus vivants. Et donc s’éloigner un peu du centre-ville bien propret.
Tribeka, le quartier popu et bobo de Zurich
Première escale, dans un quartier en pleine gentrification : l’arrondissement 4 qui s’est même trouvé un petit nom : Tribeka, pour Triangel Beim Kanzleiareal soit le triangle que forment deux des principales artères commerçantes que sont Langstrasse et Ankerstrasse. C’est un ancien quartier populaire où cohabitent des communautés venues du monde entier et les bobos suisses qui cherchent une ambiance bohème et un peu plus d’espaces verts que dans le centre-ville, pourtant tout proche. On y trouve plein de petites boutiques comme celle de la créatrice de mode Ida Gut qui y a installé son atelier et sa boutique dans une ancienne usine. C’était l’une des premières, il y a une dizaine d’années. « C’est un quartier tellement authentique. On trouve toutes sortes de gens ici, le mélange fonctionne bien. Il y a une vie de village que l’on ne trouve pas ailleurs à Zurich », assure Gloria qui tient cette boutique de vêtements branchés, avec la foi de ceux qui se considèrent en pionniers.
Exit les maisons de plaisirs et les dealers qui avaient envahies ce quartier à mesure que les ouvriers travaillant dans les petits ateliers de tisserands le désertait. Aujourd’hui, ce sont les hipsters qui fréquentent aussi bien Palestine, une petite baraque qui nourrit les noctambules avec sa cuisine israélo-palestinienne, que la Wolkshaus, l’ancienne maison des syndicats transformée en cantine branchée où le kitch a épousé le moderne comme pour illustrer la transformation du quartier. « Nous faisons la paix grâce aux falafels et au pain pita », sourit Amid derrière son comptoir de Palestine avec un regard amusé pour les familles qui se pressent au théâtre ou au spa hébergé dans la Wolkshaus…
Zurich West : entre post-industrie et nouvelles technos
Un peu plus à l’ouest encore, on trouve un quartier véritablement industriel qui est lui aussi en train de se réinventer. L’arrondissement 5 est plus connu sous le nom de Zurich Ouest. On y construisait aussi bien des bateaux que des turbines, on y coulait le métal et l’on y produisait des produits chimiques. La reconversion a été plus rapide car il a suffit de raser les vieilles usines pour y bâtir du neuf. Enfin, tout n’a pas disparu de ce passé industriel, comme en témoigne le Schiffbau. Dans les bâtiments d’un ancien chantier naval, le principal théâtre de Zurich, le Schauspielhaus, a ouvert trois salles au début des années 2000. « C’est ce qui a lancé l’essor du quartier, se souvient Christoph Gysi, le patron des Halles, l’un des premiers restos à Zurich Ouest, alors encore friche industrielle. C’était une petite révolution pour les zurichois de traverser les voies ferrées et de venir dans ce quartier excentré pour aller au théâtre. Un électrochoc qui a donné le coup d’envoi de l’incroyable révolution qu’a connu Zurich Ouest.»
Aujourd’hui, la Prime Tower (longtemps plus haute tour de la confédération helvétique avant que ces frimeurs de Bâle ne viennent ravir le titre !), élance fièrement ses 36 étages de verre et abrite des milliers de bureaux. De son sommet, prendre un verre au Clouds, permet d’embrasser la ville et de voir son évolution. Toujours plus à l’ouest… Au pied de la Prime Tower, une autre tour s’élève, celle des frères Freitag. Conçue avec des conteneurs recyclés, elle abrite leur flagship store où l’on trouve les sacs en bâches de camions recyclées que les deux frangins exportent dans le monde entier, depuis leur home town de Zurich. Le contraste entre cet immeuble de verre flambant neuf et cette tour en taule rouillée est frappant. Et il résume à lui-seul ce qu’est Zurich Ouest.
Un quartier d’affaires dans lequel on trouve un technopole flambant neuf ou l’immense et prestigieuse école d’art Toni-Areal qui héberge les expositions du Museum für Gestaltung, la plus importante institution suisse consacrée au graphisme et au design. Des galeries d’art un peu partout, notamment dans la Löwenbräu, l’ancienne brasserie de Zurich qui abrite, entre autre, le Migros Museum für Gegenwartskunst, aux expos d’art contemporain pointues. Sans oublier le MuDa, le premier musée dédié aux arts numériques au monde !
Mais on trouve aussi quelques lieux atypiques fait de bric et de broc. Comme le Frau Gerolds Garten, un lieu de vie alternatif bohème. On y trouve des bars, un restaurant et quelques boutiques. Les murs sont graffés. On cultive des plantes dans de vieux bidons recouverts de tricots. Et tous les soirs de grands braseros rassemblent ceux qui veulent partager une bière sous les étoiles… Allez jeter un œil au Bogen 33, tout à côté, qui vend de magnifiques meubles vintage, entre ambiance Mad Men et loft industriel. En continuant, un peu plus loin, le long d’un viaduc, on découvre une ribambelle de magasins de vêtements et de meubles design qui se lovent sous les belles arches en brique rouge. Tout au bout se trouve le Markethalle où il est si agréable de faire une pause déjeuner pour croquer dans une focacia vegan ou une tourte trop fooding. On peut même se balader sur le viaduc pour prendre l’air et rejoindre la gare centrale de Zurich. New-York a sa High Line, Zurich son Viadukt. Même combat, même reconversion urbaine !
Informations pratiques : www.zuerich.com/fr